Le Général Frédéric Pierre Morvan
(1786-1873)
X 1804
Chevalier de
Saint-Louis
Chevalier
de Saint-Ferdinand
d'Espagne
Commandeur
de la Légion d'honneur
Général de division
membre du
comité des fortifications et commandant le génie à l'armée des Alpes.
Il est le grand-père de Madame Amédée-Charles Prouvost, née Marie Bénat
né à Quimper (Finistère) le 16 septembre 1786,
mort en 1873, militaire français.
Il est
fils du jeune et infortuné avocat et poète, Olivier-Jean
Morvan, l'un des 26
administrateurs du Finistère, ayant levé des troupes pour protéger
les Girondins qui furent guillotinés place du Château à Brest
le 3 prairial an II ( 22 mai 1794).
Reçu à l'École
polytechnique (X 1804), M. Morvan passa en 1807
à l'École
d'application de Metz, et, en 1809,
à l'état-major du 3e corps de la grande armée en qualité de
lieutenant en second de sapeurs à la suite. Il fut chargé de la direction de
divers travaux des camps et cantonnements en Moravie, partit pour l'armée
d'Aragon, comme lieutenant d'état-major du génie, et prit une part
glorieuse au siège
de Méquinenza.
Nommé
capitaine en second de sapeurs, il fut chargé de la construction et de la
défense de la tête du pont de Xerta. Il prit part au siège de Tortose,
dirigea les retranchements de Perillo
et du Plati et des travaux du col de
Bologne, ce qui lui mérita le grade de capitaine en premier de
sapeurs le 30 janvier 1811,
et celui de capitaine en second à l'état-major du génie le 1er juillet
suivant.
M.
Morvan
se distingua à la défense du fort Saint-Philippe, au
siège de Tarragone,
et à celui de Sagonte il
fut blessé en conduisant une sape, le 16 juin 1811,
et, le 28 suivant, à l'assaut du corps de la place : ces
deux faits
d'armes lui méritèrent la décoration de la
Légion d'honneur.
Aux travaux du siège de Valence et de Peniscola, à la
défense de Dénia, il déploya beaucoup de
zèle et
d'habileté. Fait prisonnier en 1813, il fut conduit aux
Baléares. Il venait d'être atteint d'une balle
dans le corps.
Sorti des
prisons de Majorque en 1814,
M. Morvan fut mis en cantonnement dans les Pyrénées, et de là envoyé à Concarneau.
En 1815
, il se prononça pour le régime impérial et empêcha le commandant d'armes de
livrer la place aux chouans. Il fut employé sous les ordres des
généraux Lamarque et Travot.
La Restauration
le mit en surveillance et en demi-solde.
Rappelé
en 1816 comme capitaine du génie, il fut employé
à Brest puis à Concarneau.
Il
participa à l'expédition d'Espagne
en 1823, en qualité de chef de bataillon, fut
chargé de l'investissement de Saint-Sébastien,
du siège de l'île de Léon, comme
chef d'attaque de San Pietri,
et fut nommé commandant du génie à Cadix.
M. Morvan
fut créé, dans cette campagne, chevalier de
Saint-Louis et de Saint-Ferdinand
d'Espagne. Lors de l'évacuation de la Péninsule, il fut directeur des fortifications
à Bayonne, à Péronne et à Amiens, comme lieutenant-colonel en 1832.
En 1837 il fut nommé colonel du 2e
régiment du génie, et, l'année suivante, directeur des fortifications à Saint-Omer.
Il fut
enfin promu au grade de général de brigade
le 14 avril 1844,
et, le 12 juin 1848,
nommé général de division.
Il est
commandeur de la Légion d'honneur,
membre du comité des fortifications et commandant le génie à l'armée des Alpes.
Source « Frédéric
Pierre Morvan », dans Charles Mullié, Biographie des célébrités
militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, 1852
D'UN
SIECLE A L'AUTRE DE BRETAGNE EN FLANDRE
SOUVENIRS
D'UNE GRAND'MERE PRESENTES PAR SON PETIT-FILS
Souvenirs de Madame Amédée-Charles Prouvost, née Marie Bénat,
petite fille du général
Frédéric Morvan ; transmis par son petit-fils Jacques Toulemonde.
« Il
y a 90 ans, en octobre 1880, notre chère grand-mère commençait par ces mots,
une notice biographique relative à son grand-père, le général Morvan. »
« Les
pages qui suivent vous sont dédiées, mes chers enfants. Ce sont des souvenirs
recueillis pour vous, choisis dans la vie d'un aïeul qui a mérite que ses
traditions d'honneur et ses principes de vertu revivent en vous. C'est un
patrimoine que vous serez jaloux de conserver intact, car il est au-dessus des
grandeurs et des faiblesses du monde ».
« C'est le 16 septembre 1786, que naquit a Quimper, Fréderic
Morvan dont nous allons tenter de résumer la vie en suivant la biographie écrite
par sa petite-fille, notre grand-mère, et a laquelle nous avons fait allusion
au début des notes.
Sa mère, Jeanne Marie Danguy des Déserts, mourut à 32 ans en le
mettant au monde. Un membre de la famille Danguy des Déserts est actuellement
moine à la Trappe du Mont des Cats, dans le Nord, un autre est apparent à la
famille A. Lefebvre.
Le père de F. Morvan était Olivier Jean Morvan, né à Pont-Croix
dans le Finistère. Il était d'une ancienne famille de robe et lui-même, avocat
distingué, avait obtenu comme poète de brillants succès. Il était capitaine de
la garde nationale de sa ville natale et fut élu administrateur du Finistère le
7 juin 1790. En 1793 la plupart des administrateurs du Finistère furent arrêtés,
Olivier Morvan fut d'abord incarcéré à Landerneau puis à Brest, dans la prison
de cette ville. Craignant une issue fatale à son procès, il réussit à persuader
ses geôliers de lui donner la permission d'aller embrasser son fils et sa fille,
promettant de revenir se livrer à la date fixée. Frédéric Morvan ne fit
qu'entrevoir son père. Le 22 mai 1794, celui-ci était guillotiné sur la place
du Triomphe du Peuple (place du Château). La foule, à la chute de chaque tête de
ses élus, s'écriait : Vive la République ! Les deux orphelins d'Olivier Morvan allèrent
habiter Concarneau chez les sœurs de leur père.
Leurs tantes étaient de vieilles filles à l’âme noble et fière.
Quand dans un geste d'apaisement la Ville de Brest fit offrir aux demoiselles
Morvan 40.000 francs pour la tète de leur frère, elles refusèrent. Frédéric Morvan,
après de brillantes études entra à l'Ecole Poly technique fondée depuis peu. Il
en sortit dans les premiers et choisit l’arme du Génie. En 1809, il était lieutenant
et envoyé à l’armée d'Allemagne, il rejoignit son poste à Vienne peu âpres la
bataille de Wagram. De là, il fut dirigé vers l'Espagne ou Napoléon devait
essuyer ses premiers revers. Au siège de Tarragone, en 1811, il fut deux fois blessé. En 1812, devenu capitaine, il
soutint le siège de Dénia pendant 7 mois, avec une seule compagnie. Il fut blessé
en repoussant un assaut et fait prisonnier. Il fut incarcéré à Palma de
Majorque pendant 6 mois. Il ne resta pas inactif durant sa captivité, Il en
profita pour apprendre l’espagnol et s'adonner a la musique, guitare et flotte.
En mai 1814, à la suite d'échange de prisonniers, il était libre. Pendant les
Cent-Jours, il eut à lutter contre une reprise de la chouannerie en Bretagne,
ce qui lui valut, au début de la seconde restauration, d'être mis en
demi-solde. En décembre 1816 il était rappelé à l’activité avec garnison à
Concarneau ou il avait passé presque toute son enfance.
Un an plus tard, le 25 novembre 1817, il épousait Jeanne Honorée
Riouw, fille de Jean René Riouw, armateur a Douarnenez. La dot de Jeanne était
de 30.000 F. Frédéric Morvan n'apportait que son épée. Le montant de la dot de
Jeanne me parait très élevé, si je le compare à celui d'autres aïeules sensiblement
de la même époque. Je possède de cette aïeule un excellent portrait en buste
que je tiens de ma mère qui le tenait De ses parents. Le modèle avait alors 40
ans, Je possède aussi un souvenir personnel de cette arrière-arrière-grand-mère,
un coffret que lui avait offert la Reine Marie-Amélie, l’épouse de
Louis-Philippe, en 1842, à Saint-Omer.
·
En 1823, Frédéric Morvan partait à nouveau en campagne, et à
nouveau encore en Espagne. Cette guerre fut un peu l'œuvre de Châteaubriant qui
voulait donner au drapeau blanc le lustre militaire qui lui manquait. Notre ancêtre
fut nommé par ses chefs gouverneur de l’Andalousie, l’un des plus beaux pays
qui soit au monde. Je me demande si notre chère grand-mère, que je cite mot
pour mot, ne « galèje » pas un peu. Je vois très mal un tel poste confié au
chef de bataillon qu'il était à l’époque. En tout cas il revint de cette guerre
chevaler de Saint-Louis et de Saint-Ferdinand d'Espagne, médailles qui sont
venues apporter un peu de variété aux médailles qui m'impressionnaient fort
dans mon enfance et qui impressionnent aujourd'hui mes petits-enfants, où la légion
d'honneur est représentée a tous les états : rosette, cravate et plaque. Frédéric
Morvan fut successivement commandant, du Génale à Bayonne et à Péronne Dans
cette dernière ville il reçut en 1833 le roi Louis-Philippe revenant de Bruxelles,
où il avait été assisté au mariage de sa fille avec Léopold l°, roi des Belges.
Le roi lui exprima ses félicitations pour les améliorations apportées aux
fortifications et lui demanda ce qu'il pourrait faire pour lui en signe de
satisfaction. « Rien Sire, votre estime me suffit », Madame Morvan, d'après
notre grand’mère, jugea très noble mais par trop désintéressé le refus d'un
appui. Le ménage Morvan reçut à Péronne d'autres visiteurs, dont Victor Hugo. Le caractère un peu fier de notre ancêtre
eut encore l’occasion de se manifester à Saint-Omer, où il fut nommé avec le
titre de maréchal de camp, équivalent à général de brigade. J'ai lu mais n'ai
pas retrouve la référence, une polémique de notre aïeul pour une question de préséance
avec le sous-préfet, digne de Saint-Simon. De 1845 à 1848, il fut inspecteur général
de son arme en Algérie et en France. Il semble que Frédéric Morvan ait conservé
bon souvenir de cette époque, de Louis-Philippe et de sa famille, Le général
Morvan, qui avait été souvent admis aux réceptions intimes du Roi, n'avait
jamais contemplé sans admiration le spectacle qu'offrait la Reine toujours entourée
de ses filles, travaillant avec ardeur à des ouvrages destinés à des loteries de
bienfaisances. La duchesse de Montpensier toute jeune mariée, jetait un regard
à la dérobée sur l’horloge, impatiente de quitter ce cadre un peu pesant, pour
une promenade incognito au bras de son mari, ou une soirée au théâtre.
·
Apres la révolution de février 1848, le général Morvan eut à intervenir
à Paris à l'Ecole Polytechnique dans des conditions très semblables à celles de
mai 68. « En 1849 un souffle de révolte avait passé sur l'Ecole. Les élèves, peut-être
surexcités et exaltés par la pression trop forte qu'exerçaient les chefs et désireux
de montrer une insoumission qui semble de règle dans bien des écoles (écrit en 1882) se soulevèrent en
insurgés, et force fut au gouvernement d'intervenir et de menacer de licencier l’école.
Le général Morvan fut chargé de porter cette décision aux élèves par un ordre
de mission du Ministère de la Guerre. Il trouva des jeunes gens hors d'eux, qui
ne voulaient entendre aucune parole de paix ni de conciliation. Cependant au lieu
de commencer par les menaces et les mesures de rigueur, il évoqua ses années d'étude
dans cette même école, la nécessité qu'il avait sentie, lui orphelin, de se
tracer un avenir, de la chance qu'avaient ses interlocuteurs d'avoir encore leur
famille, qui risquait d'être consternée s'ils étaient licenciés à cause de leur
insubordination. Il faut croire qu'il fut éloquent, les élèves se calmèrent et le
général Morvan reçut les félicitations du Conseil des Ministres. Ses rapports
avec le Prince-Président puis Empereur, furent plus tendus qu'avec la famille
de Louis-Philippe. Il fallait bien de
temps en temps paraitre aux jeudis de l’Elysée ; une fois qu'il avait salué le
Prince-Président, il se tenait à l’ écart dans un des salons soit causant avec
un camarade, soit observant seul le coup d'œil du Palais. Un soir Louis Napoléon
faisant sans doute l’appel des invités qui formaient déjà sa cour, aperçut
Morvan dans le coin d'une galerie, dérobé par ses filles et plusieurs autres
personnes. Il le reconnut et l’interpella: « Eh bien, général Morvan, vous êtes
bloqué! » Morvan s'inclina seulement sans révéler un mot que d'autres auraient
pu trouver blessant. A une autre occasion, Napoléon III eut tout loisir de
connaitre la loyauté de Morvan envers ses camarades. Sollicité par l'Empereur
de critiquer une attitude à Rome du maréchal Vaillant, il répondit au Souverain
que le maréchal étant sur place, était le meilleur juge de ce qu'il fallait
faire. La seule intrusion de notre ancêtre dans les affaires fut un poste d'administrateur
des Forges de l'Aveyron. II s'y lia avec le Duc Decazes qui en était le président
et chez qui il dinait souvent. II y rencontrait M. Thiers et différents hommes
politiques.
·
En 1852, le général Morvan, qui habitait alors rue Godot-de-Mauroy,
fut mis a la retraite et en 1854 nomme grand officier de la Légion d'Honneur.
Je ne décrirai pas ce que fut sa retraite, car notre grand’mère décrit ces années
dans les pages qui suivent. Il mourut en 1873 avec calme et résignation. Par un
dernier geste de modestie et peut-être de fierté, il avait comme un autre général
un siècle plus tard exprimé le désir formel que les honneurs dus à son rang
dans la hiérarchie militaire et dans la Légion d'Honneur ne lui soient pas
rendus. »
·
· Remerciements à Sylvie-Lelouarn-Motte, descendante du Général, qui nous a fourni ces documents.